1.24.2013

Permeke/ Le Peintre Transitoire

On peut avoir connu profondément et se perdre en translation. On peut user jusqu'à la corde, ravaler sur des décennies, compter jusqu'au dernier coup de pinceau et cartographier.
Et on peut attendre les derniers jours, qu'il fasse froid, avoir bu un peu et se faufiler entre un groupe âgé en fauteuils roulants.
C'est pressé et très tendu et ça doit aller et venir en parlant à haute voix et contraindre les mots qui reviennent

"cubisme", "die Brücke"

"La Maternité" c'est Michel-Ange désossé, le dessin préparatoire présent et séparé dans l'abondance de la masse et le gras. Et les violences hallucinées des coups d'huile et le rendu, global et assuré, fondu, bardé, compartimenté.

Quatre ans pour cet amour soeural, tendre dans leurs traits gras, les cheveux lâchés et laissés, sans détails. Autour encore, où sur chaque toile les étapes se marquent, la finesse du dessin puis les tombreaux d'huile comme une patate délicatement tranchée et trempée dans la friture pour être savourée comme un met fin.

L'enjeu et la rigueur pour la maîtrise de l'équilibre des masses et c'est un légère lame de jaune, un son sourd de blanc, par là qui apaise et dépose la chair aussi confortable que tourmentée.

Quelques toiles trop colorées ou des marines longues et ennuyeuses, probablement pour que Permeke puisse se réoxygéner. Un terminus de toile illuminée puisé dans les réserves du "Brücke", avec loin encore, du Kokoschka, même et dans "L'arrachement de pommes de terre" des espaces délimités comme du pré-Rothko et les couches successives de genres successifs qui font de lui, un peintre transitoire.

Rien n'est jamais, ni laissé, ni effacé, mais recouvert en transparence, pour marquer une haine de la perte quelle qu'elle puisse être, une absence totale de gaspillage. Et par là une drôle de forme de futurisme paysan et là du miel dans la mélasse des ciels et intérieurs de Flandre jusqu'à la passe morne et molle, lasse de la cinquantaine qu'il retourne et achève en revenant encore plus loin à lui dans "Le Pain Quotidien".

Puis quand c'est fini, on refait un tour pour s'arrêter et se graver "Pêcheur" au fusain, 1921 et "Les moissonneurs endormies".