6.30.2014

La grammaire quantique/Le genre n'existe pas

Je ne suis pas un homme. Je ne suis pas une femme.
J'ai une queue. Tu as une chatte.
Mais cette excroissance ou ce manque ne peuvent justifier la tranchée, la séparation et le conditionnement que l'on a posé sur toutes choses.
Je ne suis ni l'un ni l'autre parce que je ne suis ni l'un ni l'autre.
C'est aussi simple que ça.
La complexité que je porte est un vivier et, séparé, compartimenté, je ne suis qu'une partie floue de moi.
Je n'ai aucune idée de ce que peut bien représenter le principe masculin ou le principe féminin comme unité sécable et suffisante à générer une identité et une construction même personnelle de moi, encore moins d'une société.
Une queue. Une chatte. Un jeu.
Un principe beaucoup moins évident que ce que le binarisme, le conservatisme, les religions peuvent proposer.
Le démembrement de la grammaire française doit commencer par là. Il faut être clair. Et lorsque ce n'est pas possible, il faut marquer l'imprécision et la définir en son dans la langue.
Ce que nous ne savons pas, nous devons l'assumer.



La grammaire quantique/le trop est l'ennemi du vrai

"Terrasse de janvier, Jill attend."
S'il je n'écris pas de prépositions, si je n'en utilise pas ce n'est pas qu'une question de rythme, c'est surtout une question de précision dans l'imprécis, un cerclage des limites autant qu'une ouverture tentaculaire sur le potentiel.
"Terrasse de janvier" c'est la totalité précise de la réalité de cette terrasse, toutes les prépositions qu'elle contient, sans adjectifs, ce sont tous les adjectifs qu'elle est, sans verbes, c'est son inaction dans la scène. Déposer un élément en plus, ce serait l'enfermer dans une réalité qui n'est pas, parce qu'autant incomplète que subjective et ce que la subjectivité ôte à la réalité.
Elle est également l'ensemble, le volume en quelque sorte, de ses possibilités.
Toute énumération est fausse. Et toute énumération appauvrit le texte, goge le fond dans une forme erronée.
La plupart des outils grammaticaux que nous utilisons, pensant préciser et enrichir ne conduisent en réalité qu'à des troubles sémantiques majeurs.
La métaphore, donc la poésie, est le seul langage à peu près clair.

6.26.2014

La grammaire quantique/Sur la question du genre

La déchirure de l'espace binaire, cette cohésion artificielle, ce carré tabassé dans le cercle, cet un qui ne peut être l'autre, ce non qui ne dit jamais oui, cette déchirure doit être le premier acte du démembrement de la grammaire française.

Sur la question du genre que la Suède tente de résoudre en ajoutant un neutre à sa langue, c'est l'idée même du masculin et du féminin qu'il faut abattre. Le genre, là, sous-tend et une unité et une séparation, alors qu'il n'y a pas d'unité, pas d'homogène, la consécration simple d'une illusion qui a été une volonté.
Une idée n'est qu'un mot qui a fuit un jour après avoir essayé de décrire quelque chose. Dans ce vague qui est devenu un projet politique, c'est l'aberrant qui structure, en niant par les ombres, la caverne elle-même.

Le soleil est féminin en allemand, la lune masculin,
 le con, la verge, la bite, le vagin.

C'est le "le et le "la" qu'il faut effacer et disparaître. Et trouver alors un son qui définisse plus précisément, la nature, même supposée, même inconnue ou mal-encore-connue des choses.

Un "o", par exemple, quelque part, ce son qui tourne l'air dans la bouche, ce sont qui cherche d'abord à entourer la chose.

Je vais bousiller la grammaire pour bousiller la société.

6.24.2014

Le soleil ne se lève pas/Pour une grammaire quantique

La langue se fait dans la rue, dans le torrent, avant de geler parfois dans les académies. La langue est un biotope, le quotidien est son vivier, elle mue.
La grammaire est une philosophie, la structuration d'une vision, le cadre d'un projet, la ligne brutale d'une politique, une pensée qui génèse tous les rapports.
Le bruit qui vient des zones ailleurs de la société, les banlieues par exemple pour la france, est un bruit joyeux, polyphonique et polyvore des sens, la vraie vie de la langue est là, pas dans les citadelles du centre et de toutes les écoles qui voudrait centrer les périphéries de nos rapports au monde.
C'est un bruit de rythme doux et bon, rythme de vie vivace, biotope d'un autre code.

Mais ce n'est pas un bruit de la révolte, encore moins un bruit insurrectionnel, à rien de tout changement,
parce que c'est un bruit de lexique, une tranchée dans les mots, une réappropriation de tous les sois mais dans la règle du code, le non-droit n'est pas un non-droit, il est le même droit, gérer non pas autrement mais par d'autres.
La richesse de la langue coulante, vivace est d'abord un détournement enrichi, décalé du lexique du droit et du pouvoir,
comme si le pouvoir était un lexique
et non une syntaxe.

Le pouvoir est une grammaire.

Le français comme langue est un archaïsme de pensée, un rance blotti d'une richesse parfaite d'une époque qui n'a plus rien de la nôtre mais qui est conservée, dans sa structure binaire, dans l'enjeu des positions qui sont les fonctions, dans la séparation absolue des fonctions, dans la hiérarchie totale.

Cette grammaire qui est écoutée, puis entendue et reproduite et enseignée et répétée, qui est la transmission d'un autre monde, celui du serfs et des forges.

mon projet littéraire est de bousiller cette forme, cette grammaire,
qu'elle devienne, là, l'image du monde comme il est (mal encore) vu par la science.

Le soleil ne se lève pas. On tourne.

Je veux une grammaire quantique.

6.23.2014

Haïku de route/2

C'est interminable et constant, assis sur un fauteuil, quatre couloirs de trace, quatre fuseaux à tisser dans le ciel de la nuit qui vient, là, juste au-dessus, le smog de demain, le loin, les points, l'horizon des points qui vaguent et grossissent puis vrombe au-dessus du balcon du Royal Century, la piscine, bas, vide et éclairée.


Chicanos, mère et fille grasse au balcon sur la droite et toujours ces lumières comme un oeil qui s'approche et se multiplie en s'étirant et ronfle et bruit pour arriver, trois palmiers en lutte dans cette nature des particules, le ton sourd et gras du boulevard.


Des masses de chairs, des chairs d'hommes, des chairs de femmes énormes au matin assis sur le canapé du petit-déjeuner de muffins et café, la machine à céréales et le lait dans le frigo, face à la réception, à l'arrivée de la femme de ménages. Combien vivent ici de ses Black et Mexicains qui se gavent en costume ou survêtement et les touristes rares et perdu et ceux qui remontent manger dans leurs chambres?






6.17.2014

l'addition


Dans l’addition déjà, nous est sous-entendue la soustraction qui nous préservera de l’ennui réel de l’autre, de l’existence comparée de l’autre, de l’épuisement des intersections de l’autre, des achèvements de l’autre, qui nous protégera en somme des possibilités destructrices de l’autre.

 Aujourd’hui la soustraction est la suite logique de l’addition comme l’addition est la nécessité induite par le spectacle pour diffuser et partager nos manques, définir dans la jalousie et l’écho concupiscent la marchandise d’autres à accumuler. 

La soustraction est la libération nécessaire de l’autre pour pouvoir, dans la marchandise et la marchandise ultime et première que je suis, enfin se réaliser et se réaliser sans entrave et ce, avant de se réadditionner pour se présenter et se représenter et renvoyer en miroir, une conscience que l’on voudrait individuelle mais qui n’a jamais été plus collective dans l’histoire de l’humanité.

6.16.2014

Haïku de route/1

Premières lignes d'étendue sans étages, étirées loin, longues, brumeuses, les anges lapés de particules grasses. Sans fin, à ronger dans la terre.

Les pas des couloirs à dissoudre les jambes lourdes et la queue pour avoir droit d'y être, tous ces papiers qu'on oublie de remplir et les yeux en poche, les poussées nicotine, à travers l'espagnol, noircir nos droits, se faire scanner, poser les pouces, nous existons maintenant, dans la ficherie, nous sommes une donnée, nous sommes sus et sués nous allons attendre la ronde pour nous récupérer.

Je perds encore les feuilles d'entrée, ce bleu, ces bleus massifs, plissés qui toisent, tout ce sérieux pour pouvoir enfin sortir et prendre le premier taxi qui n'en ai bien sûr pas un mais il faut tant se poser, s'étendre, tous ces quatre murs qui permettent de commencer sérieusement à sortir.


Inglewood.