7.19.2012

A propos du Parti Pirate

La question centrale de la politique est sa correspondance avec son époque, l'écho qu'elle est et provoque sur un instant donné de l'histoire.
Il n'est pas de savoir le niveau de mensonge ou de vérité répandu, ni de s'interroger sur la différence entre les partis, mais bien de se demander si le message idéologique primale s'accorde avec les données actuelles de la demande.
La politique est un rapport économique qui doit être à même de gérer les manques et les besoins du citoyen.
La politique comme pouvoir est la réponse proposée aux manques et besoins, non pas la réalisation d'un projet qui réduirait ou effacerait ce manque et comblerait ce besoin, mais la cristallisation consciente d'une frustration, sa pose collective sur la place publique, son spectacle et son sacrifice comme exutoire opérant et suffisant.

Le problème principal auquel se trouve confronté un parti politique est de pouvoir comprendre les desiderata de son électorat, de les anticiper-même pour pouvoir entièrement et pleinement les représenter. Il se peut tout à fait qu'il garde des réflexes, des automatismes, une manière tant que cette manière n'apparaît pas à l'électorat réel de ce parti comme n'ayant plus d'assise sur l'appréciation que cet électorat à de la réalité.

On fonctionne par mots-clés et on rattache spectaculairement la réalité à ces mots-clés, on la suffit à eux. On évolue en fonction du niveau de conscience du peuple, on transfère sémantiquement le manque, le besoin et la réponse-type.

Mais il peut arriver un point du temps, de la réalité historique où le projet-même et les mots-clés attenants soient dépassés et deviennent relativement inopérant. C'est le cas lorsque la société dans sa forme s'accélère et que le surplus de forme conditionne les bases d'un nouveau fond, encore indéfini.

La totalité spectaculaire dans son engendrement de l'égo-mythe et de son conditionnement bureaucratique à créer un être polyphrène et la constante de sa déstructuration.
Nous sommes des twitters compulsifs et warholiens, majoritairement salariés, quotidiennement consommateurs et périodiquement citoyens.
Nous avons des désirs, des aspirations, des environnements, des conditionnements qu'aucun parti politique ne peut englober, ni comprendre et encore moins résoudre.

La société voulue par le capitalisme spectaculaire a engendré un être parfaitement dompté, moi, mais qui ne se retrouve dans aucun projet idéologique,
ou pour être plus clair, dans aucun projet collectif.

Je ne peux que vouloir être la naissance d'un projet collectif, en être le maître adoré mais je ne veux en aucun cas être responsable de quoi que ce soit, je veux être le mot qui pousse et l'absence de conséquence de ce mot.
Je suis le jour terré dans la nuit.


L'émergence d'un parti appelé Pirate, qui se présente et gagne des élections sans aucun programme, sans aucune idée, sans aucun projet, sans aucune perspective et sans aucune cohérence est non pas la marque d'une défiance, d'une démission, d'un désintérêt d'une partie du corps électoral, mais bien la conscience claire et précise de ce même-corps non seulement d'une incapacité des partis traditionnels à être ici-et-maintenant,
mais également de l'absence totale d'être de la société occidentale.



Le Parti Pirate est le miroir exactement flou d'une société parfaitement et volontairement déstructurée.


Le Parti Pirate prône une liberté sans la définir, liberté dans laquelle peut se retrouver sans aucun problème un fasciste futuriste, un gauliste keynésien et un écologiste libéral.



C'est là, le réel intérêt de l'émergence de ce parti, du moins en Allemagne, la France vivant toujours dans l'écho de 68, de montrer à la fois, comme un parfait reflet, une société délitée et instructurée et son désir citoyen profond d'être politique et politisé,
en somme le désir de se structurer à nouveau, la volonté d'équilibre dans le collectif.

Mais sommes-nous prêts à la privation de l'égo, ne serait-ce que parcellaire?
(moi pas)


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