3.02.2017

Cinéma/ Sur "Jaures" de Dieutre






Les films de pd parlent d'amour. Souvent bien mieux que les films d'hétéro.

Simon n'est pas là, mais il est toujours là. Simon, dans ce film, est pris par derrière. On ne le voit. Il ne sait pas qu'on le voit, qu'il est lu et entendu, aimé sans que, ni lui ni Dieutre, ne se le disent.

Dieutre aime. Et sa pudeur à le dire, l'impudise à le montrer.

"Jaures" est une splendide lettre à l'être aimé qui n'en a rien à foutre du reste.

Il utilise le tiers-cinéma et le défausse dans sa peine à lui. Il trahit en sublimant un genre.

Un cinéaste ne filme pas par hasard. Sinon, c'est un touriste. Une année de prise d'images, dans un angle voulu, déterminé, construit, mais s'il peut arguer que c(s)es images étaient prises sans idée derrière la tête, ce n'est pas innocent.

Le film commence sur un cadre construit, des fenêtres volées sur l'immeuble d'en face, du bleu, du rouge, du jaune, dézoome sur un plan général fade pour mettre en évidence les voix off.

Les cadres qui constituent le film, sont des cadres de caméra de surveillances. Fixe, flic, fade, un neutre à composer dans le commentaire.

Des zooms et des serrés de feuilles d'arbres pour couper les séquences. Les feuilles qui semblent perdurer d'une saison l'autre (arbre triste qui ne meurt pas l'automne et ne revivent pas le printemps) sont, à la passion d'un amour qui ne s'engage pas, l'image de l'ennui d'une pauvre tendresse urbaine et celle de la frustration de pas être pregnant dans la seule vie vibrante et bourgeoisement adorée de Simon dans sa maison de campagne.

Dieutre est dégueulasse parce qu'il montre les visages, les habitudes, les réalités de ces "petits afghans" vivants sous le ponts ou sur les berges pour se préserver de montrer les images de son amour et de son amant. Il protège celui-ci en prostituant ceux-là. Le seul lieu qui n'est pas filmé par la police ce sont les bureaux de la police.

L'amour est inconditionnel et n'a pas de limite. Cette lettre est splendide et abjecte à la hauteur de sa splendeur.

Poser un film comme une partie d'un manifeste esthétique et politique, c'est vitale. Echouer dans les deux par indécence et égo-trip serait dommage, juste dommage, si le cinéma, aujourd'hui, n'avait pas radicalement besoin de cette forme.

 Dieutre se gâche. Dans la comparaison qu'il fait entre sa perte, sa situation et celle des "petits Afghans, dans sa condescendance "parigote", c'est-à-dire détachée, pompeuse, auto-centrée, pédante.

On en oublierait la beauté du montage son.

 Heureusement, il y a Cavalier, entre autre, pour nous donner la puissance du tiers-cinéma, conscient (ouvert sur un intime universel) et doux (utilisant des métaphores et comparaisons qui n'ont pas besoin de violer ce qu'il y a derrière la fenêtre pour se faire un discours).

Mais dans la pauvresse du cinéma, il doit, absolument, être vu, ne serait-ce que pour, via le tiers-cinéma, faire quelque chose de juste.





















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