11.20.2014

La grammaire est Sexy/ Le futur ne sert à rien



En français comme dans la plupart des langues parlée en Europe, le temps et l'action sont intimement liés. Le temps, en un certain sens nous sert à stabiliser, à existencialiser nos actions, à les inscrire en photographie sur une ligne du temps, inscrite si loin en nous, toujours spacialisée.

Dans un post précédent, je disais qu'il fallait, non pas éviter d'utiliser, mais s'abstraire de penser au conditionnel passé et au conditionnel.

L'inexistence est le regret, la conditionnalité, une probabilité faible. Ce sont, dans tous les cas, des "hors de", des translations du ici et maintenant vers un vide, toujours confortable même lorsqu'il se manifeste en nous rongeant.

Mais la seule réalité, c'est l'instant. Le passé que je pense n'existe d'une part qu'en rapport à maintenant et d'autre part, n'existe plus que maintenant.

Lorsque je me projette dans le futur, je ne peux que l'imaginer. Futur simple comme une estimation d'une forte probabilité de réalisation, conditionnel comme une faible probabilité. Le futur antérieur, encore plus flou puisqu'il exprime un processus impliquant deux inconnues qui doivent se succéder pour advenir. Le futur proche étant la manifestation d'une intention du présent, il flotte vers ici, c'est moi qui étend mes bras.

Quand j'utilise un temps du futur, je ne peux qu'imaginer une action et la traduction de cette action aura le goût soit du désir, soit de l'attente, soit de l'espoir. La volonté, elle, si elle existe, ne peut être que présente, elle s'oblige à être là.

Imaginer l'action.


Dans mon dictionnaire ces trois verbes, désirer, attendre et espérer sont rayés, biffés au marqueur noir indélébile.

Le désir me contraint, quel qu'il soit. Il m'entrave. Il génère l'image d'un besoin qui n'est que son besoin et qui conditionnera mes actions jusqu'à un assouvissement qui fondra dans un instant qui n'aura pas le temps de se réaliser et de jouir de lui-même qu'il aura déjà disparu pour faire place au désir suivant, l'exponentiel ou le même du premier ou un nouveau. Mais le terme "désir" est faux, il s'appelle en fait "manque".
La société spectaculaire l'a toujours considéré comme l'alpha et l'oméga de sa structure et de son modus operandi. La création de nouveaux désirs est sa lutte constante. Et lorsque l'innovation fait défaut, elle recycle en vintage un ancien toujours nouveau.


L'attente est un mouroir. Bien entendu, je peux la passer (m'en débarrasser en somme) en lisant, en parlant, en dormant, en rêvant, en socialisant. Encore heureux. Mais ces différentes activités ne se font pas pour elles-mêmes, elles sont utilisées afin de remplir un intervalle perdu. Elles sont en annexe.
L'attente c'est la pause forcée, c'est la chaîne qui t'empêche de commencer quelque chose, de continuer quelque chose ou de finir quelque chose. L'attente est une frustration, un rythme brisé, un AVC de l'ici et du maintenant.



L'espoir est une calamité. La nourriture de la foi. La nourriture de tous les plus tard, des remises à jour, des après, des Edens, de la pension, des vacances, du samedi soir où toujours
toujours ce sera, Enfin.
La connerie du Grand soir parce que l'International "sera" puisque personne n'a jamais vraiment voulu qu'il soit.
La faiblesse profonde de toutes les religions monothéistes qui sont des pensées de mort où le Bien s'il existe, le Beau, s'il existe "sera" et n'"est" jamais.
L'espoir, c'est mettre en d'autres mains, souvent inexistentes et impuissantes la toute douce volonté d'être. Et ce qui est agir.

Ici et Maintenant.

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