1.07.2016

Haïku de route-105/ To-to-Kon oo-lah




















Le vrai est vieux comme une vie tenue par les burnes et acclimaté au jeu gris que pipe et repipe ses dés et ses putes et cette file qui n'était rien sur la 120 et les terrasses de roches lisses et nue sur la Big Oak, nue sur El Portal, des 3000 au 1200 hurle là, sur Southside Drive un gros cri gras dont nous sommes un atome d'air dans le courant qui s'étire, lent, balant, entre les corridors de troncs et de mai qui donne, cette année, presque trop tôt. Notre empreinte dans la trace de tôles ternes et diurnes. C'est dingue ce qu'on est devenu nombreux. On roule presque au pas, c'est à se demander d'où nous venons tous. On aimerait bien s'arrêter pas trop loin mais on ne sait pas vraiment pas trop loin de quoi. Déjà ça a commencé le long de la route comme quand on va dans aux fêtes, dans les villages, les jours de caveaux ouverts et que, petit à petit, on en a marre de tourner ou alors on est arrivé tard et on ne pense même pas à tourner et qu'on s'arrête n'importe comment, de plus en plus n'importe où. Les voitures devant nous s'avancent au rythme du car devant elles qui s'avance au rythme des voitures devant lui. En face, le retour semble plus fluide. Le soleil est là, tout là-haut. Les arbres font une arche puis ne la font plus et El Capitan tombe sur la gauche, en face de Cathedral Rocks East et dans le fond, les autres. Nous là, au milieu, tout en bas, dans le juste milieu, à notre jolie mesure, ce tout en bas qui nous blottit, nous enferme et nous protège, ce juste milieu de la vallée qui est déjà comme un sommet.


Et là, roulant au pas ou arrêtée, la meute des carne de tôles est révélée et les moteurs, chantant leur hosannah, surgissent du rien du parc, surgissent du jour qui est une autre nuit, surgissent de notre jour qui est leur nuit. Les cars dégueulent les troupeaux ruinés du sauvage qui s'amassent, attendant les pasteurs, bruissant et ronflant puis s'en allant en marche, dodelinant, leurs nikons sanglés au cou, puisqu'il faut bien dodeliner vers les pâturages incontournables inscrits et étoilés dans les guides de voyage, paître l'air et la vue et remplir les cartes mémoires avant de s'en revenir dans un ballet d'alpe et de désalpe se tasser dans les cars, les bus, pleins à nouveau, gonflé de leurs jambes gonflées des trails après trails, les yeux encore blets et quand est-ce qu'on mange déjà? Nous sommes nous aussi enfilés dans ce vrac, dans le cadre creux de la cadence des corps, des corps de tôles et bientôt des corps de chair vers l'un ou l'autre trail menant aux noms gras de la carte. Et c'est vrai ça, quand est-ce qu'on mange? Même ma mère sent la faim qui vient, une faim légère mais présente. Ce sont tous ces airs qui changent, ces balances de pression, la montagne ouvre bien l'appêtit comme la mer ouvre la soif. Mais bon, de là à rêver aux sandwichs tellement emballé, il y a une marge. C'est histoire de faire l'affaire. Ce soir, je visualise déjà quelque chose de massif et dégoulinant d'un gras sucré.


On se parque à gauche de la Southside sur la bande plus foncée, entre deux voitures et suffisamment de place pour que ma mère puisse manoeuvre sans stresser. Mais elle a vraiment pris le coup, malgré le pente sur D qu'on traîne mais on n'est pas vraiment pressé. J'ai l'impression qu'on ne découvrira jamais à quoi sert le S, mais je n'insiste plus. Il y a vraiment du monde. On sort de la Ford dans la gouache de gens, on dirait un samedi matin à la migro. Mais quand on est dedans, on est tout pareil, gouache nous aussi alors et nous aussi, nous irons dodeliner dans les trails et nous, là aussi, tout de suite, comme les autres, nous levons la tête vers l'à-plat de To-to-Kon oo-lah, le nom indien d'El Capitan. Ma mère a pris son sac et moi celui du picnic. On n'a pas eu assez d'heures pour se sentir vraiment seul, mais, pourtant, ces heures de Ford qui comptent quand même et des lieus sans vraiment de foule. Ici, la route arrêtée, la tôle arrêtée, dense, serrée, stationnée comme sur Sunset. Devant nous, pas très loin, quelques personnes s'agglomèrent autour d'un homme, la soixantaine chauve et son petit téléscope sur pieds pour les choses hors de l'espace, pour rendre en grand le petit du monde, pour les oiseaux sur l'autre versant de la vallée ou, là, pour les alpinistes qui escaladent la paroi. Il ne faut plus 47 jours pour atteindre le sommet du Nose. Il nous laisse jeter un oeil. Je distingue à peine les points minuscules qui grimpe en libre ce Skyline de granit. Selon la voie choisie, on y dort, suspendu dans des portaledges. Je ne les connais pas. Est-ce Pacific Ocean Wall? Zodiac? Tangerine trip? Aucune idée. Ce doit être comme s'endormir ivre sur le lisse d'un zinc dans l'équilibre du tabouret et d'un autre vertige. Ou à peu près.











































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