2.19.2016

Haïku de route-120/ Two Rats

























Je crois qu'il y a une histoire de rats avec des trucs comme ça. Deux rats qui vivaient en collocation. Un jour, l'un des deux décide de courir dans le monde pour trouver le bonheur et l'autre s'en fout un peu du monde et préfère rester peinard chez lui à boire des bières dans son sofa. Je ne sais pas si ce sont des petits rats ou des rats rachitiques ou des gros rats comme ceux qui traînaient le long de l'Arve sous le pont de Carouge dans l'hiver 98. Mais je ne crois pas que ce soit si important. Le truc c'est que le rat qui était parti faire le monde pour dénicher la cachette du bonheur était revenu un jour chez lui et l'avait trouvé, ce bonheur, en train de faire la sieste devant sa porte. Et il s'était retrouvé bien con. Mais moi je ne suis pas sûr que j'eusse été plus heureux si j'étais resté sous l'autre arbre, à côté de celui de ma mère à la place de courir vers la Lower Yosemite Falls. Et ça n'aurait pas changer grand chose si je m'étais arrêté avec les mini-shorts. Il y aurait toujours eu quelque chose à penser. Il y aurait toujours quelque chose qui démange. J'avais jamais bien compris cette histoire de rat. Ou plutôt, je l'avais comprise de travers. Je pensais que c'était le rat qui était resté à boire des bières dans son sofa qui avait décroché la timballe en se la coulant douce, avec le bonheur à portée de main, sans effort. Tranquille. Mais en fait, aucun des deux rats ne l'attrape ce bonheur. Ni celui qui lui court après, ni celui qui ne pense même pas à ouvrir la porte pour aérer un peu la pièce.


Un jour ma mère était venue me rendre visite, en hiver, comme d'habitude. Il ne faisait pas si froid. C'était pas si gris. On avait pris le train vers Ostende, histoire de voir la mer du Nord, cette mer plus triste encore que la mer Morte. On était arrivé en fin de matinée. On avait passé le pont avec les bateaux et vaqué un peu dans les rues, par Kaaistraat et on avait rejoint Christinastraat qu'on avait suivie vers l'eau au fond. On s'était un peu balladé sur la promenade, on avait longé le Casino et hésité sur les restaurants. Je ne me rappelle plus exactement où on s'était arrêté manger, le Bottarga peut-être ou le Savarin. Ou un autre, je ne sais plus. Je ne sais plus ce que nous avons mangé. Le soleil donnait ce jour-là. On regardait la mer. Et on est allé faire la sieste sur la plage, sur des transats entre des coupe-vents. C'était février ou novembre. Ou peut-être que je me trompe et que j'ai tout oublié et que c'était un avril tardif et froid. On ne disait rien. Ma mère avait fermé ses yeux. On prenait le soleil. On évitait le vent. On sentait le soleil par les narines de la peau. Devant, sur la plage, je regardais entre deux yeux clos, un couple assez jeune, couché sur le sable, enlacé. Je regardais les mains du mec fouiller sous le pull de la fille et ses cheveux à elle recouvrir son visage à lui. Puis je refermais les yeux et les rouvrais un peu après. Je regardais ma mère qui somnolait, je regardais les mains du mecs sur les seins de la fille qui essayait de les cacher de ses cheveux et, parfois, elle relevait la tête et regardait autour et alors lui aussi, il levait la tête et il regardait autour. Puis il replongeait dans ses seins. Et moi je plongeais en eux puis je plongeais en moi et entre je regardais ma mère, en balance et tout était bien.


On remonte le chemin et on rejoint la Ford. On achève la Southside Drive et on bifurque à la hauteur du Curry Village Recreation pour prendre la Northside Drive. On passe devant le US Probation and Parole Office. Puis il y a tout un village avec des choses attirantes, un ATM, un Sport Shop, un Shop et d'autres trucs qu'on ne verra jamais. La Northside c'est comme la Southside, à l'envers. Les gens roulent gentiment, au pas, se laisse passer. On passe les Loges. Toutes la vallée est usée et préservée, léchée, fonctionnelle et belle. C'est terrifiant. On arrive à la hauteur de l'arrêt de bus au moment où les mini-shorts traversent la route. On les laisse passer. Elles ne savent pas que j'existe. Mais j'ai rien fait pour. J'aimerais écouter l'album Stoned Age Men. Mais je ne l'ai pas. Je n'ai pas envie de tenter la radio. J'écarte les pans de la carte du parc, sur mes genoux, comme j'écarterai des cuisses, je glisse mon doigt le long de la Northside Drive. Je redemande à ma mère si ça ne la tenterait pas quand même et si elle aurait le courage de pousser le détour vers Glacier Point. Mais elle ne semble pas très motivée. Je trace alors la route pour sortir du parc et descendre vers la plaine et Fresno. Je lui dit que nous avons le temps de traîner un peu. rien n'a l'air vraiment loin, vraiment long. L'après-midi commence à peine. On suit la Merced.





































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