10.04.2014

Haïku de route 10/ Oublier la jambe gauche









Nuages le matin pour la chappe, la trame dense, nuage le soir qui reviennent, couvrent, tamisent les dialogues des lampadaires, des phares qui tranchent, le dialogue des enseignes, le ciel qui se basse entre les jours dans le mouvement des carnes, les masses denses du ciel qui enveloppent L.A. comme un burger, je me couche avec les poules, ma mère dans le lit à côté qui dort déjà, la porte-fenêtre entrouverte, les draps tendus, je m'enserre à dormir lourd, longue à la journée demain, on sort de là, les lignes éclaires des avions qui livrent sans discontinuer de la vie vive à la ville.


On se réveille tôt sans problème, la nuit traversée, douche chaude, douche froide, les valises presque prêtes, je rampe comme d'habitude dans la permanence d'oublier, on descend à la réception on l'on se cougne sur le canapé à manger nos donuts et corn-flakes. Les gens semblent énormes. On demande à la femme vietnamienne minuscule derrière la vitre de nous appeler un taxi, jaune cette fois, j'espère. On descend à ronger le ventre des cafés sans effet.


C'est le passé le soleil des jours, je regarde à l'arrière dans les lignes qui se plient et sourient les traces, le présent ne sert qu'à faire, dans l'avenir, des souvenirs joyeux, à grillager des lectures et soumettre des compartiments de sous-zone de la mémoire, l'ici et maintenant, la nécessité d'y crier pour les échos de la joie, Narcisse sans rivière. Je ne sais pas encore que toutes les rues de l'Amérique sont les mêmes, je ne sais pas encore qu'ici, le rêve des maigres c'est la graisse et je sens ma mère anxieuse, le taxi est arrivé. Nous allons chercher la voiture qu'elle a louée dans les sous-périphéries enchevêtrées de l'aéroport. Je n'ai toujours pas mon permis de conduire et ma mère n'a jamais conduit d'automatique. Oublier la jambe gauche comme nous a dit mon frère qui a fait la route longue tout seul dans la Californie après la mort de papa. Oublier la jambe gauche.




























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