1.18.2015

Haïku de route-27/ Camp Sugarloaf, Grapevine, Waterman Junction, Barstow

Les voitures sont rares, les parkings presque vides, le silence presque là. Je me demande ce que font les Marines, si la base est occupée, s'ils viennent danser les jours de permission, s'ils tuent quelque part. Barstow dans la nuit, défonce probable et putains édentées au Cactus, le reste de la communauté à vaquer entre les Interstates, la fête chez la fille hugante du Liquor, la route que l'on traverse en digérant DiNapoli, longeant la réception et les motos au repos. Les noms d'une ville. Sa traversée. Ses identités. Ses peaux, plusieurs renaissances, l'or et l'argent, le Camp Cady à 32 miles dans les troubles indiens des ruées vers l'ouest, Paiute, Mojave, Chemehuevi à pacifier, Camp Sugarloaf, Grapevine quand l'eau d'hiver jaillit verte sur les sol et gorge la rivière puis Waterman Junction et l'eau qui bout comme le rêve de l'or et fuse les chevaux vapeurs, William Barstow Strong et la Santa Fe Railroad qui tranchait ce bout de terre où les autoroutes ont fait pousser Chevron et le béton et l'asphalte et les motels où j'ouvre la porte de notre chambre et la fenêtre pour l'air.


D'autres traces dans la nuit, les lumières alignées qui sont descendues du ciel pour filer sur la I15, le fuite entre tous les Vegas, le rêve de l'or encore, tendant dans les nerfs les bras sur les changements de vitesse, milliers de lucifers dans les rouages de l'ennui et le manque qui ronge, le manque des chasses, le manque des belles sueurs, le manque d'être et de jouer à tout perdre en filant la nuit et les jours. Je n'irai pas me baigner, l'eau est trop froide, je regarde la piscine, je prends la bière qui me reste, un linge au cas où, ma mère dans la salle de bain se prépare, méthodique, enlève ses boucles d'oreille, se démaquille dans son pyjama vert, doux et concentré, crucial comme sont tous les rituels. Je sors, sur la droite vers le bout, je descends un étage, la machine à glaçon et la porte, le silence, la route, loin, le métal froid de la grille, les Hollandais. Hi. Cet accent qui les cibles tout de suite, je m'assieds avec eux. Ou peut-être que j'étais allongé sur un transat, avant qu'ils n'arrivent. Je ne sais plus, ça ne change pas grand chose de toute manière.


Comme la ville, j'aimerais trouver des noms pour mes métarmophoses à venir. J'aurais voulu un ciel et une bière, seul, les constellations rassurantes à plus de 8000 km, les retrouver. On peut courir les espaces, s'effacer, déménager pour tout reprendre mais l'oeil levé, la fuite s'éteint, c'est toujours Orion, la première que je repère, le Chasseur, l'odeur de la chasse, la constallation du désir. J'aurais voulu un transat et l'eau seule, me baigner d'être en silence mais pour cela, il faut le courage du désert et le fond des grottes sans ciel, Nix et Ouranos effacés dans la pierre, les tanières lentes, lointaines des lampadaires et du couple de Hollandais qui me raconte les trois mois de route à travers le Nevada et la Californie, les enfants grands qui se débrouillent enfin, la paix sur une route à se retrouver sans rien réserver, construire un rythme pour souffler les années à donner, les expirer et reprendre du vif. Le temps est un espace comme un autre. J'essaie de parler néerlandais, des bribes, des phrases hâchées, des verbes mal placés, le retour à l'anglais, l'échange sous la pergola et dans la dernière gorgée, un retour vers la grille où je les enferme à eux et je vais me coucher.



































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