10.20.2015

Haïku de route-79/ Fuck Ya All































C'est beau et apaisant. Maman marche devant en regardant ces pieds. Le sol est par endroit sec et craquelé, de pierres durs ou de fanges. Elle évite les cloaques où les larves de mouches gogent dans des communautés grouillantes, serrées dans les poches de survie, en masse, parce que, contre le monde il n'y a que le nombre. Ici, il n'y a que nous. La famille à la fille au serpent a disparu. Il n'y a pas de vent. Le ciel est bleu. Mais pas comme quand on était sous la mer. Il est bleu comme à deux mille mètres, comme au barrage après le chalet. L'herbe commence à grouiller à fleur de boue, à 5-6 mètres du bord. Ma mère semble heureuse et reposée. Cette journée était nécessaire. Je sais qu'elle aime l'eau. Je sais qu'elle aime la montagne. Je sais que ces informations suffsent pour savoir les lieux où s'être bien. Nous marchons en vrillant entre la fange et les mouches, les poches d'eau, passant d'un dur à l'autre. Elle est toujours un peu devant moi. Nous construisons chacun notre chemin. Nous sommes l'oeil au sol. Nous sommes nos itinéraires.


Est-ce parce que Los Angeles a soif que les tufa sortent et apparaissent si bien? Le lac est bas parce que les éloignés s'en foutent, parce qu'ils ont soif, parce qu'ils doivent prendre des bains, parce qu'ils doivent jouir de gaspiller pour jouir de vivre. La distance nous efface le monde. La distance nous fait faire la sieste sur le monde. Elle empêche d'être au monde. Mais c'est elle aussi dans laquelle ma mère et moi nous parlons le mieux. Je ne sais pas ce que c'est qu'un gaz sur un gamin syrien ou l'odeur de la poussière ensevelie dans le nez d'un corps sous Gaza. Mes images sont mon sofa mais ce sofa c'est celui dans lequel je skype ma mère. Oui, c'est toujours dans la distance qu'on se parle le mieux. C'est toujours par elle. Alors, pas à cause d'elle mais grâce à elle. Même puisqu'elle. Avec ma mère on se parle toujours par fulgurance. Ou plutôt elle me parle toujours par fulgurance. Moi, je parle. Je parle. Je parle de rien et de beaucoup, je nourris le rien et le silence et je nourris mes tout, je les glisse dans des discours portés indirects. Je suis mon vide et l'insupportable de mon vide.


Ce n'est pas que LA. Son comté est assoiffé. Elle, elle regarde l'océan et rêve. Mais les naufragés savent que le sel tue et que la beauté ne sert que le ventre plein. Il n'y a pas d'art dans la faim. Pas d'art dans la soif. C'est pour cela que l'art n'a d'intérêt que dans la faim et la soif. Il n'est ni vrai, ni réel, ni concret, ni abstrait, ni un peu ni rien. il est la réaction; Il est combat; L'art est combat. L'art est combat contre soi ou le reste ou les autres ou tout ou contre le rien ou contre toi. L'art n'a pas de théorie. Il est, parce nous ne sommes pas des chiens, pas des singes, pas des bêtes, parce que nous sommes, parce nous sommes là, parce que nous voulons dire, nous dire, nous dire à toi, nous mettre, parce que nous voulons nous mettre et nous entremettre, l'art est là, parce que je veux parler à ma mère, parce que je n'ai pas les mots, j'en ai trop et pas les bons, parce que je veux des phrases, des mots d'elle et pas des mots plats. Je veux mes mots plats pour ses réponses denses. L'art c'est pour tous les toi que tu es et que tu portes, tous les cancers que tu es et que tu portes, l'art est punk parce qu'il aime sa mère et vous encule tous.








































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