3.17.2015

Haïku de route- 39/ Fritzl's Daughters



S'arrêter à Dante, peut-être. Le lustre des soleils salés. Ma mère aime le Nord, le désert bleu des soleils gelés. Ici, c'est le miel morne et les descentes de coude cagnant. Dans les hémisphères du froid, le difficile se réflète ou marche de face. La peine vient à nous en côté opposé et parallèle et on la croise au centre et on s'écarte mutuellement vers l'étire qu'on sait resister. Dieu, lui, est lâche et caniculaire. Il ne peut que tomber, il ne peut que s'abattre. Il est l'effondré et son miroir, le suc et le sel. Le monothéisme est une pluie de plomb et ce désert d'or, les déserts d'or croquent et plient du toc où s'amoncellent les illuminations comme des chèvres assoiffées. Les serpents rigolent bien. Nos 70% d'eau s'y perdent et hurlent aux dieux une pierre à sucer. Tous les prophètes ont gogé et se sont humiliés aux mirages qu'ils aspiraient. Putain comme c'est simple à comprendre. Il suffit juste d'envoyer un gentil paumé sur-sensible dans le cagnard pendant trois jours et l'écouter à son retour s'il est encore vivant. Dieu c'est comme Facebook et notre siècle est déjà spirituel parce que dans nos pauvresses timides, paresseuses ou lâches, nous ne savons que rêver du réel virtuel. Les révélations sont des fièvres, les fièvres tristes de Job, ivres de Noé, sociopathes d'Abraham, les fièvres de fièvres des incestes et des pierres, putain, les religions du Livre sont des séquelles d'insolation.



Mais ce genre de connerie ne me travaille pas vraiment quand nous remontons dans la voiture. Mes "révélations" se font sous air conditionné. Je vois ma mère. Je connais ma mère. J'oublie tous les âges et j'oublie tout, je veux oublier tout. Je roadtripe avec une trentenaire ou même pas. Je ne réalise pas. Les gens sont vivants. Puis ils meurent. Dimitri n'a pas de cheveux blancs. Mes amis ne vieillissent pas. On boit des canettes au terrain. On fume chez Djé. Fabrice a sorti son couteau sur Sandre avant qu'on entre chez lui avec Kropf. On est tous là. On a toujours été là. Pas vrai les gars? Mais bon, on éclot toujours à la réalité à un moment ou à un autre, des éclairs. J'y reviens, pas le choix, regarder par la fenêtre, je disais et quand on y jette nos yeux, alors dedans, tout change. On ferait d'y rester, peut-être, s'étendre à la cave et la faire comme perspective. La cave, cette éternité, les enfants de Fritzl ne se rendent pas compte de leur bonheur. Le tout c'est une bonne ventilation. Il faut bien se rendre à l'évidence, sur la carte c'est encore loin. Je vais voir comment multiplier les arrêts. Ma mère a passé 70 ans, je ne sais pas encore, je ne comprends évidemment pas, mais je sens. Et je dois trouver des manières. S'arrêter. Dès qu'on peut. Quand on peut. Aussi souvent qu'on peut.


Les limbes. Les virées du Nord. La tension et l'abattage des rayons bourrés, le salut et les cascades d'Islande, le Mont Withney et la blanche en source, Needle Hgwy, nos tristesses. On devait monter en Finlande, vers les boréales, c'était  en 99 ou en 98. On devait le refaire avec ma mère, reprendre dans l'enfance des voyages. Ma mère avait tout organisé. On avait rendez-vous à Zurich, dans le hall de l'aéroport. Je venais d'emmenager au 10 bis qui ne s'appelait pas encore comme ça. Il y avait Dimi. Il y avait Charlotte. Toutes les raisons. Le squatt avait tout à refaire, on le ferait et on le fera. L'hiver arrivait. On avait le tuyau qui nous reliait, j'étais jeune comme il fallait, c'était l'idéal. On virait les parasites? Vlad, Lb et Marau vivait en face. Et ça a brûlé. Une connerie. Des histoires d'huile. J'étais sorti comme un con avec ma couverture, la nuit venait, les flammes aussi, Marau, à la porte, m'a dit, barre-toi connard, il avait bien raison, ça aurait pu exploser, le feu prenait déjà bien. Et tout le monde était sorti. Une couverture... Comme dans les livres où tout est évident et finit bien. Le lendemain on devait décoller. J'ai dû m'endormir bien perturbé et bien défoncé. Ils viendront tous vivre là. J'ai laissé ma mère monter à Zurich et m'attendre comme une conne dans le hall de l'aéroport. J'ai pu la joindre. Peut-être qu'il y a eu un appel général. On est jamais allé en Finlande. Je suis resté parce que c'était une merde à laquelle je devais absolument participer. C'est comme ça.



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