3.12.2012

Nouvelle/11 La tension monte

Ils étaient entassés, empilés, presque ivres, déjà bien mis le long de la balustrade, encore en maillot, certains en short, semi-hilares et de plus en plus gras. Ils ne perdaient rien de ce qui se passait sur le terrain.
Ils aimaient unilatéralement.
En-bas, sur les gradins, des femmes, la quarantaine, la cinquantaine, simili-classieuses, apprêtées sans forcer, suivaient les cuisses et les mollets, ricanantes, enchaînant les verres de vins blancs, guindantes passablement derrière leurs lunettes de soleil, tant qu'il y avait encore une raison.
Le match venait de reprendre.
Les supporters de l'équipe adverse, légèrement exilé, au bord du terrain, peu nombreux, invectivaient l'arbitre. Pas de chant de leur côté. Des cris lourds entre deux gorgées. Les filles se taisaient, se retournant, tantôt souriantes, tantôt hochant la tête en direction de la balustrade, énervées de façade, matantes.
Des poussettes s'éloignaient juste après que le soleil a passé les arbres.
Les serveuses descendraient plus tard, gauches, une caisse de bières vide à la main, récupérer les bouteilles qui traînaient et que personne ne rapporterait.
La tension montait.
Dans les gradins rien ne filtrait, rien ne se vivait d'autre que les poses méthodiquement appliquées et les regards sur les corps tout en discutant de profile. Plus haut, les chants redoublaient. Toujours plus gras.
Tout était parfaitement normal dans ce dimanche après-midi de l'upper-class de banlieue. Et le printemps venait.

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